Comme nous le faisons au fil des articles Nord Découverte, partir à la recherche d’un patrimoine, ce n’est pas seulement parler d’histoire. C’est aussi découvrir des lieux qui sont bien plus grands que cela. Des lieux insolites, méconnus, attachants, des lieux qui nous laissent davantage qu’un souvenir. Ils nous offrent quelques heures d’évasion, de belles promenades, de curiosité, d’envie d’en savoir plus et surtout … d’y revenir. Aujourd’hui,  nous partons à la rencontre des maisons à pans de bois de Lille … Et ce qu’elles nous disent de nos villes d’autrefois.

Un mode de construction que partage le Moyen-Âge et le XIXe siècle

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Il y a encore à Lille deux générations de maisons à pans de bois. L’une, le long du parvis de la Treille, du XVIe, est le dernier témoin de la construction courante des maisons en bois du Lille ancien. A partir de février 1566, une ordonnance interdit leur construction dans l’enceinte même de la ville. Les secondes sont des maisons essentiellement ouvrières qui, à partir du XIXe siècle commencent à occuper les faubourgs de la ville. On les trouve notamment dans les zones laissées nues au-delà des fortifications. Clin d’œil de l’histoire, si les premières disparurent parce qu’elles étaient trop souvent des sources d’incendie, les autres furent justement construites de cette façon parce qu’il fallait qu’elles brûlent vite en cas d’attaque de la ville !

Le XVIe  siècle fatal aux maisons à pans de bois dans Lille

vue de la façade en bois de la maison de la Treille

Si on veut imaginer à quoi pouvait ressembler Lille à la sortie du Moyen Age, il faut se diriger vers le parvis de la Treille, sur le côté de la cathédrale. C’est à l’arrière de la maison du 39 rue de la Monnaie, le long du passage Notre-Dame de la Treille, qu’on découvre la dernière façade en bois de Lille “intra-muros”. Construite au milieu du XVIe siècle, il s’en est fallu d’un rien qu’elle ne disparaisse, elle aussi, au début du XXe siècle. Elle sera finalement restaurée en 1997 pat l’architecte François Bisman. Cachée par les arbres et les murs de clôture, on peut cependant apercevoir en grande partie la façade médiévale. Les croisées des ouvertures, les vitraux et le bardage vertical en bois sont caractéristiques des constructions post-renaissance, remplacées peu à peu par les édifices en pierre.

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Devenues rares, ces maisons en bois du XVIe ne sont plus qu’une poignée dans la région. Par chance, nous pouvons encore en voir trois à Valenciennes, (au 1 rue Askièvre, occupée par l’ Office du Tourisme ), une 12 rue Famars, enfin la troisième 94, rue de Paris). A Cambrai, elle est située au 48, rue de Noyon, occupée également par l’Office du Tourisme.

Dans ces deux villes, on les appelle les maisons espagnoles ou maison scaldienne (de l’Escaut). Ces maisons construites durant la domination Espagnole, fin XVIe siècle, étaient énormément répandues dans la région. Leur conception est identique : Au rez-de-chaussée, l’échoppe marchande, le logement familial est à l’étage, la façade en avancée est en bois et le pignon généralement couvert d’ardoise.

vue de la façade d'une maison des XVe et XVIe à Douai

Dans une architecture un peu différente, il subsiste, à Douai, une maison des XVe et XVIe. Cette construction datée de 1450 aurait été restaurée à la moitié du XVIe. Son architecture générale a été peu modifiée par la suite. Elle se situe à l’angle de la rue des Huit-Prêtres et la rue du Clocher Saint-Pierre.

Les maisons ouvrières des anciens faubourgs de Lille

Même si elles ont presque entièrement disparues, on peut encore voir, ici ou là, ces curieuses petites maisons dont la particularité est d’être constituées de  bardages en bois, des planches, plus au moins régulières qui recouvrent les murs. Moins coûteuses que les constructions en pierre et en l’occurrence en brique pour la région, elles avaient également une autre raison d’être : celle d’être immédiatement démontées ou brûlées en cas d’attaque dans les zones de glacis, le terrain à découvert, qui se trouvaient à proximité des fortifications.

C’est ainsi que les dernières maisons encore visibles aujourd’hui sur la métropole se trouvent à l’entrée du quartier Saint-Maurice-Pellevoisin notamment rue du Faubourg de Roubaix et rue des Jardins Caulier. A Wazemmes, quartier autrefois en dehors de Lille, vous verrez l’étonnante maison occupée par la salle de spectacle la Barraca Zem  à angle de la rue d’Anvers et la rue des Flandres. On peut encore en voir une ou deux, rue Paul Doumer, à l’entrée de La Madeleine. En, 1826, l’auteur du Guide des Étrangers dans Lille écrivait au sujet de ces maisons en bois : ” Ces constructions provisoires,  relevées depuis peu hors de la Porte de Roubaix, semblent ne subsister que dans l’attente d’un siège, et que l’on s’efforce néanmoins d’embellir, n’ont nullement l’apparence d’un faubourg. C’est plutôt un espèce de camp volant, prêt à déménager au premier coup de fusil.”

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Pour avoir une idée de cette architecture particulière, allez vous promener dans le quartier Saint-Maurice, rue des Jardins Caulier. Vous y verrez plusieurs maisons à pans de bois magnifiquement entretenues. L’une d’elles est même un rare exemple de maison champêtre telle que le quartier autrefois appelé Saint-Maurice-des-Champs pouvaient en compter au début du XIXe siècle. En effet, l’ancien lieu de promenade et de villégiature des Lillois, couvert de bois et de guinguettes avant la profonde mutation industrielle de la fin du XIXe siècle,  avait un tout autre visage… La rue des Guinguettes est devenue en 1921 la rue Eugène Jacquet … Et Saint-Maurice-des-Champs est aujourd’hui Saint-Maurice-Pellevoisin… Mais les amoureux d’architecture et des petits jardins au charme fou seront surpris par ce quartier encore méconnu pour lequel nous avons eu un vrai coup de cœur.