Suivez l’énigmatique bras d’or accroché depuis plusieurs siècles à l’angle de la rue. Ancienne enseigne de gantier, d’imprimeur… L’objet insolite garde encore tout son mystère… Mais ce n’est pas la seule curiosité de la rue Grande-Chaussée. Levez les yeux. Vous retrouverez les angelots et leur symbolique foncière : lorsqu’ils se regardent, c’est la même maison. Dos-à-dos, ils marquent la limite de voisinage. Plus loin, des bateaux flottent sur les murs et le balcon… Au N°17, si le magasin a rouvert, vous découvrirez un enchevêtrement insolite de façades intérieures.Enfin, au bout de la rue, arrêtez-vous à l’Huîtrière, un des plus beaux édifices Art Déco en France.

La rue Grande-Chaussée : un condensé d’histoires…

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Oui, entre lèche-vitrines et nez en l’air, vous parcourez une des plus vieilles rues de Lille. Une artère principale, mentionnée dès le XIe siècle, mais sans aucun doute présente bien avant.  Elle menait de l’ancienne place du Marché (la Grand’Place et la place du Théâtre actuelles) au castrum,   le cœur fortifié de Lille,  en gros le quartier de la Treille d’aujourd’hui. Les vieilles maisons de bois qui longeaient l’artère ont été remplacées par de prestigieux rangs de maisons de pierres au XVII et XVIIIe siècle. Cette voie “royale”, prisée des marchands, a conservé son caractère prestigieux. Vous y trouverez aujourd’hui encore tous les grands noms des boutiques de luxe.

Un curieux bras d’Or nous guide …

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Dès le début du XVIe siècle, on mentionne l’immense maison en bois à trois étages qui ouvre la rue “Grant Cauchie”, qui deviendra “Grande- Chaussée”. En 1763, elle sera reconstruite en pierre et l’insolite enseigne replacée à sa place. On sait que le rez-de-chaussée de la maison fut occupé successivement par un apothicaire (1622), des imprimeurs, un magasin d’articles religieux et d’objets de piété… Mais quant à l’origine du bras d’or… Mystère. Parmi les pistes avancées, l’une nous conduit à la tradition des “Graignards”.

Selon Edmond Lamblin, ces enseignes à caractère “grotesques” sont posées sur la façade des officines pharmaceutiques. Une tradition répandue en Flandre et dans les Pays-bas. Pourquoi pas… Même si le dessin du bras n’a rien de grotesque en lui-même. Il est plus que probable que l’enseigne soit celle d’une boutique ou d’une taverne. Un nombre incalculable d’entre elles porte encore ce nom un peu partout en France.

Une ville dans la ville, c’est le double parcellaire …

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Une des curiosités de cette rue est de voir un aspect caché de la ville d’autrefois : les maisons construites en “double parcellaire”. Ce sont des habitations constituées en îlots. Leurs façades donnaient sur des petites cours intérieures, formant un enchevêtrement de passages étroits dont l’accès était souvent la maison ou l’échoppe en front de rue. La configuration urbaine de Lille, enserré dans ses fortifications, rendait l’espace constructible précieux et rare.

Cette ville dans la ville a presque entièrement disparu. Seuls quelque rares magasins, rue Lepelletier et ici, rue Grande-Chaussée, offrent encore l’occasion de le voir facilement. En entrant au n° 17, on voit clairement la seconde façade intérieure, un petit escalier en colimaçon, autrefois en extérieur et l’auvent en bois qui en permet l’accès. L’ancienne cour est désormais couverte d’une verrière.

Un bateau sous les toits …

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Un peu plus loin, au n° 23, levez les yeux sur les bateaux qui décorent les balcons et les cartouches. L’enseigne, qui rappelle le caractère fluvial et marchand de Lille est signalée dans les anciens guides de la ville. Ils mentionnent  une inscription, disparue depuis, ” A la Navire d’argent” qui deviendra la Nef d’argent”. On date les représentations taillées dans la pierre du XVIe siècle au moins, date à laquelle ces navires se dotent de plusieurs voiles comme c’est le cas ici. Le motif des balcons est quant à lui plus tardif.

Les archives de la ville ont conservé un souvenir précis de l’auberge la Nef d’Argent. En effet, la rue encore bordée de maisons en bois va être la proie d’un incendie parti, semble-t-il, des écuries de l’auberge. Nous sommes en 1545. Les ordonnances de réglementation quant à l’emploi de matériaux inflammables vont être renforcées pour aboutir à l’interdiction à partir de 1566 de toute nouvelle construction de maison en bois dans l’enceinte de Lille.

L’ombre de d’Artagnan au détour de la rue…

gravure représentant d'Artagnan

En passant devant les n° 20 et 26, de la rue Grande-Chaussée, pensez au célèbre d’Artagnan. On dit qu’il y réside peut-être lorsqu’il est gouverneur de Lille d’avril à décembre 1672. On sait que, dans une ville nouvellement française, la tâche va s’avérer ardue. Son caractère souvent emporté, va aussi compliquer les choses. Pour le mousquetaire déjà vieillissant, plus habitué à l’épée qu’à la diplomatie, la charge est pesante. Et sans doute un de ses derniers “faits d’armes”. En effet, quelques mois après son départ, il sera tué au siège de Maastricht le 25 mai 1673. Il connaissait déjà Lille. En 1665, il fait partie des troupes de Louis XIV qui prennent d’assaut la ville, alors sous contrôle espagnol. La capitale des Flandres rejoint le giron du royaume de France.

Mais qui est vraiment d’Artagnan ? On sait en vérité peu de chose sur lui. La réalité et la légende se mélangent sans cesse. Le héros de cape et d’épée a pris le pas sur l’homme de guerre gascon. Il est probable que sans l’incroyable succès des Trois Mousquetaires d’Alexandre Dumas, Charles de Batz de Castelmore, dit d’Artagnan, aurait connu une postérité plus tranquille.

Découvrez d’Artagnan au coeur des rues lilloises

L’Huîtrière, quand l’Art Déco tient boutique…

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Tout au bout de la rue Grande-Chaussée, vous ne verrez que lui. Majestueux, insolite, superbe. L’Huîtrière, établissement centenaire, est une des adresses les plus mythiques de Lille. À plus d’un titre. Même si le célèbre restaurant a désormais fermé, la poissonnerie et le bar à huîtres sont toujours une des valeurs sûres parmi les bonnes adresses lilloises. Mais l’autre partie de sa renommée est cette extraordinaire façade Art Déco, parmi une des plus belles de France.

Découvrez la fabuleuse architecture de l’Huîtrière


  • Faites un petit crochet au début de la rue Basse


Une des rares façades renaissance de Lille

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C’est lors de travaux de réfection de la façade qu’on a découvert, au n° 16, un des très rares exemples d’architecture renaissance à Lille. Il daterait à priori de la fin XVIe siècle. On peut admirer la coupe gothique des fenêtres du 1er étage ainsi que les coquilles Saint-Jacques qui ornent les tympans. C’est un des symboles récurrents du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle. Selon l’architecte François Bisman, chaque ville possède une rue Saint-Jacques, orientée vers la ville de Compostelle, sur un axe nord-sud. Or, c’est le cas de la rue Basse à Lille.

Rappelons également que la rue Basse, en continuité de la rue de la Barre, était une des voies principales de passage des hommes et des marchandises entre le port ” Grand-Rivage” de la Basse-Deûle (actuellement l’avenue du peuple Belge) et la Haute-Dêule, au niveau des actuels quais de Wault. Les deux autres édifices renaissance connus à Lille sont la maison de bois du 39, rue de la Monnaie et la façade du restaurant Le Compostelle rue Saint-Étienne.

  • De la rue Grande-Chaussée à la rue des Chats-Bossus.

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En continuant par la rue des Chats-Bossus, vous découvrez, au n° 12, une vieille enseigne d’estaminet qui est l’occasion de dire quelques mots sur l’origine de ce nom pittoresque. Deux écoles s’affrontent. L’une se référant à la présence d’un ancien cabaret ayant pour enseigne des chats bossus ; l’autre prônant que le nom viendrait de “caboche”, désignant les crânes des animaux dépecés par les tanneurs qui occupaient autrefois la rue et les entassaient là. Notons pour la petite histoire que la ville de Lille a réglementé très tôt, dès 1567, la pose des enseignes des auberges et des cabarets qui devaient être visibles et surtout devant l’entrée principale… Car nombre de riverains se plaignait en effet d’être dérangés à toute heure du jour – et surtout de la nuit – par des clients se trompant de porte !

vue panoramique de la place Louise de Bettignie dans le Vieux-Lille

En nous dirigeant vers la petite place du Lion d’or, vous remarquerez la façade du n° 23-25 datée de 1644. L’ordonnancement du rez-de-chaussée diffère par le jeu horizontal, en relief et en retrait, du parement des grès. On notera aussi les ancres murales plus travaillées que les “moustaches ” des autres maisons de la rue. Pour la petite histoire, la façade n’est une construction d’origine, mais un élément architectural apporté et ajusté sur un édifice plus ancien lors d’un alignement de la rue.

Après avoir traversé la petite place du Lion d’Or surtout dominée par l’imposant immeuble du XIXe siècle et sa façade en bow-window sur quatre étages, nous arrivons à la place Louise de Bettignies et sa prodigieuse maison Gilles de la Boe.


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