Il est toujours le gardien d’une rencontre… Celle de la mer du Nord et de la Manche qui se rejoignent ici, au large de la plage de la Huchette à Marck. Même si le signal du phare de Walde s’est éteint définitivement en juillet 2001, il reste sa silhouette insolite. Tantôt au milieu des flots, tantôt perdu dans l’immensité incroyable de cette plage sauvage… Il semble comme un immense insecte posé sur le sable lorsque la mer se retire à plus de 3 Km du rivage.
Certes, il est loin le temps de sa splendeur où curieux et ingénieurs admireraient son architecture audacieuse, élégante, venue d’outre-manche. Le temps où son signal (éclats rouges 4″ et blancs 20″ fixes) portait à 10 miles au large. Tempêtes, guerres, vagues et vents salés n’auront pas eu raison de cette étrange construction de fer. Il reste et demeure le seul phare métallique sur pieux en France.
Mis en service à partir de 1859, le phare de Walde est aujourd’hui totalement laissé à l’abandon. Il faut donc se plonger dans les ouvrages techniques du XIXe pour le redécouvrir à ses grandes heures.
Le signal des grands bancs de Calais
Les bancs qui entourent le littoral de Calais sont un véritable piège pour les bateaux qui se dirigent vers le port, vers Gravelines ou Dunkerque. Les fonds sablonneux de la pointe du Walde, recouverts à marée haute, ne permettent pas une construction en pierre. On fait alors appel à un procédé révolutionnaire mis au point en 1833 par un ingénieur irlandais, Alexandre Mitchell: le pilier ou pieu à vis.
Le premier phare de ce type est celui de Maplin Sands dans l’estuaire de la Tamise (1838). Au fil des années, l’ossature architecturale s’affine et s’améliore. Le Wyre Light dans le chenal de Fleetwood en Angleterre (1839) est davantage similaire au phare de Walde. La résistance de leurs assises dans les sols mouvants, leur rapidité de fabrication et d’installation, enfin, leur coût plus réduit que les constructions traditionnelles… Sont autant d’atouts qui vont faire la popularité de ces feux. Mais devenus obsolètes pour la plupart d’entre eux, ils sont malheureusement de plus en plus rares aujourd’hui.
Dans l’intimité du phare de Walde …
À quoi pouvait bien ressembler le phare de Walde lorsque les premiers gardiens (ils étaient trois à l’origine) prirent possession des lieux ?
Il faut aller fouiller dans les carnets des ingénieurs maritimes pour trouver des renseignements précieux notamment sur l’agencement de l’habitat. La structure, haute de 18 m au total, est conçue pour dominer de 11 mètres le niveau le plus haut des flots. La plate-forme hexagonale (7 m de diamètre env.) est surmontée d’un balcon circulaire extérieur autour de la lanterne. Elle repose sur un axe central et 6 pieds vissés dans le sable à plus de 5 mètres de profondeur. Ils sont reliés entre eux par des entretoises et des croix de Saint-André.
Un habitat spartiate mais fonctionnel
L’habitation est en revêtement de tôle noire à l’extérieur et boisée en chêne à l’intérieur. Elle se divise en plusieurs espaces fonctionnels :
“En face de l’entrée est la chambre des gardiens, dans laquelle on a indiqué par des lignes ponctuées la place qu’occupent les lits pendant la nuit. Ces lits sont habituellement relevés et enfermés dans les armoires établies en arrière de chacun d’eux. Un poêle-cuisine est appliqué contre le mur, en face de la porte d’entrée. On trouve aussi des armoires aux vivres (chaque gardien a la sienne) ; une cuve aux huiles ; une caisse à eau en tôle ; un coffre à charbon. Enfin un petit escalier circulaire en fonte, d’une dizaine de marches, conduit de cette chambre dans celle de la lanterne. Elle est elle-même entourée à l’extérieur d’un balcon circulaire. Les cloisons de distribution sont en bois. Les ouvertures comprennent une porte et 5 fenêtres à guillotine. Elles se composent de deux châssis, l’un supérieur et fixe, l’autre inférieur et mobile, se relevant pour ouvrir en glissant parallèlement au premier“.
Un long déclin … Mais une belle histoire
L’échafaudage est terminé le 15 septembre 1857. On allume le feu pour la première fois le 15 décembre 1859. En juin 1897, réduction des coûts oblige, on automatise le signal. Plus aucun gardien n’est alors affecté à ce poste. En 1986, on démonte l’ancienne lanterne pour la remplacer par un petit signal alimenté par des panneaux solaires. Le 4 juillet 2001, le phare s’éteint définitivement… Et reste à l’abandon.
Le phare de Walde est à l’image de l’ingénierie humaine d’un XIXe siècle inventif, bouillonnant, insolant dans ses défis. Une prouesse technique qui en fait aujourd’hui un patrimoine architectural à part entière.
Enfin, pour finir, voici une anecdote rapportée par les gazettes de l’époque… En 1867, un des gardiens du phare trouva une bouteille sur le sable. Elle contenait trois cartes de visites … Celles de M. et Mme Henri Desseine et Maurice Gilbert, passagers d’un bateau de pêche d’Ostende qui coula corps et biens.
Tout autour, l’impressionnante plage de la Huchette de Marck
L’immense plage de la Huchette à un vol de mouette de Calais est des plus impressionnantes qui soit … Un espace totalement sauvage où les plus courageux devront faire 3 km pour rejoindre la mer à marée basse. Un long ruban de sable qui fait le bonheur des phoques et des veaux marins qui se prélassent autour du phare… Mais aussi des amateurs de chars à voile… Des cavaliers, des randonneurs… Sans oublier les amoureux des oiseaux avec l’espace naturel du Fort Vert. Autre curiosité qu’apprécieront les gourmets, la salicorne, avec son goût acidulé et salé caractéristique.
Découvrez avec nous la plage de la Huchette
NORD DÉCOUVERTE | LE PHARE DE WALDE EN PRATIQUE
Accès à la plage de la Huchette et stationnement : Avenue de la Mer, 62730 Marck.
Autre possibilité d’accès au littoral et de stationnement: au bout de la rampe Paul via la rue Jean Bart. On est au début de la digue Taaf, sur le tracé du GR 120
Toutous acceptés toute l’année sur la plage
Activités plein air : Base de char à voile – Spot de surf et kitesurf – Pêche à pieds des coques ou huchettes
Les amateurs de longue marche poursuivront via le GR 120 en direction des plages des Hemmes, des Escardines et la réserve naturelle du Platier d’Oye, à proximité de Gravelines.
Prudence : les Hemmes de Marck sont une zone de chasse d’août à février. Il est important de respecter la signalisation durant cette période.
2 Commentaires
DE ROO
Merci pour cet article très bien écrit et joliment illustré ! On a envie de s’y déplacer , enfin . C’est tout près et pourtant méconnu … Belle initiative , bonne continuation !
Sylvie
Isabelle Duvivier
Merci beaucoup Sylvie pour votre commentaire. C’est en effet un lieu étonnant qui mérite d’être découvert. Toute l’équipe vous souhaite de belles promenades.