Si on devait faire la liste des noms qu’on lui donne, cette page n’y suffirait pas. Pierre de Dessus-Bise, Dessous-Bise, Soubise, Sybise, Sybisse… Pierre, au singulier comme au pluriel. Une chose est sûre, le mégalithe qui occupe un angle de la place du Vieux-Marché à Sars-Poteries ne manque pas de piquant.
Une pierre sans dessus dessous…
C’est au cœur de l’Avesnois qu’on retrouve une des pierres les plus épiques de notre région Nord. Une pierre à la forme en pain de sucre très suggestive, surtout sur une face. Une forme qui n’est pas pour rien dans les versions, tout aussi suggestives de son nom. Alors la Pierre de Dessus-Bise est-elle un simple mégalithe, une pierre funéraire, une borne, un pilori, une pierre de jeunesse ou une pierre de fécondité ? Et si finalement, entre légendes, histoires et traditions, elle était, peut-être, un peu tout cela à la fois ?
Car si la pierre de Sars-Poterie a fait couler autant d’encre, ce n’est pas pour ses dimensions qui restent modestes. Elle dépasse à peine 1m50 de haut pour 2m80 de diamètre. On est loin d’égaler les blocs monumentaux de la vallée de la Sensée comme la pierre du Diable à Lécluse, le Gros Caillou d’Oisy-le-Verger ou encore les pierres Jumelles d’Ecoivres. Non, en réalité, elle doit sa réputation à sa forme ovoïdale et au petit carré de quelques centimètres à son sommet qui suscite la curiosité.
La pierre de Dessus-Bise et son mystérieux trou
À lire René Minon dans la vie dans le Nord de la France au XVIIIe siècle, la coutume voulait qu’on place, un drapeau de la jeunesse au sommet de la pierre en temps de fête. Ce rite initiatique aurait été un marqueur social du passage de l’adolescence à l’âge adulte. “Pour être admis dans la corporation et prendre part aux divertissements publics, chaque adolescent devait uriner au-dessus de la Pierre de Dessus-Bise, dont le nom indique assez la destination.”. Mais ce n’est pas la seule “utilisation” du gré sarséen .
Cette forme si singulière et le nom de la pierre auraient alimenté une autre tradition. On murmure en effet que les femmes stériles et celles qui souhaitaient avoir un enfant devaient s’asseoir dessus. On comprend pourquoi. Cette tradition est d’ailleurs répandue un peu partout en France. Friction, décoction, ronde, plantage de clou… On ne compte plus les menhirs, sarcophages, fresques, sépultures, statues de saints qui ont ainsi prodigué autant d’espoirs que de fécondité. Un pouvoir qu’on attribue également aux curieuses pierres de Niergnies à la forme tout aussi évocatrice. C’est sans compter également sur la simple malice de ces messieurs. Certains ne se sont sans doute pas privé d’exiger de leur belle, une bise à la pierre. Inutile de préciser la suggestivité du geste.
Enfin, dernière supposition : a-t-elle servi également de pilori où le condamné attaché ainsi en place publique faisait acte de contrition ? En réalité, aucune hypothèse n’exclut l’autre. Le réemploi des mégalithes et des pierres taillées a été courant.
Une chose fait aujourd’hui consensus : la pierre de Dessus-Bise de Sars-Poteries est bien un mégalithe. Est-ce un menhir comme sa fiche de classement l’indique ? Ou fait-elle partie en réalité d’un ancien dolmen voire d’un cromlech comme en témoigne un de nos internautes ? On a en effet retrouvé à proximité plusieurs blocs de pierre qui le laissent penser. Vous les verrez exposés quelques mètres plus bas, à l’angle de la rue Potier. L’un d’eux de forme plus pyramidale fait aussi penser à la pierre levée de Clary, distante d’une soixantaine de kilomètres qui, elle non plus, n’a pas livré tous ses mystères.
2 Commentaires
Isabelle Duvivier
Merci infiniment pour cette information tout à fait passionnante. Je vais essayer d’approfondir ce point et notamment le lien avec les pierres visibles rue Potier. En effet, beaucoup de mégalithes et d’alignements ont disparu dans le Nord comme ailleurs… Un sujet d’actualité…
Encore merci pour cette précision.
Joël Harpin
Bonjour,
Il a existé un cromlech à Sars Poterie, découvert au milieu des années 80′ à l’occasion de la construction d’un bâtiment de ferme. Les agriculteurs propriétaires de la parcelle avait bien signalé à de nombreuses reprises aux services archéologiques la présence de grosses pierres disposées en cercle dépassant légèrement du sol sans susciter de réaction. Les travaux de terrassement avaient révélé de ces affleurements de pierres étaient en réalité des mégalithes formant un cromlech malheureusement détruit à jamais. La presse locale avait alors relaté les relevés topographiques réalisés en catastrophe afin de conserver a minima la mémoire de la position de ses pierres.